A-t-elle un sens cette journée? [ PV ]

Elle se promène tard dans la nuit, le petit ange se promène mais la noirceur l’envahit lentement. La noirceur essai de l’envahir, elle veut s’immiscer dans le cœur du petit ange. Dispute, nouvelle vision, incarcération, frôler la mort de si peu sans que personne ne s’en rende compte? Peut être n’est-elle pas si importante que ça après tout. Et si elle était morte à cet instant… qui aurait pleuré? Qui aurait réagit? On dirait bien que personne n’aurait versé des larmes. Non partout elle n’est qu’une pièce sur un échiquier. D’un coté on la veut pour son don et de l’autre coté par souci de solidarité. Son seul vrai compagnon? Blue, le seul le vrai…Lui il s’était fait du souci, lui s’il avait pu serait venu à son secours. Mais en ce moment, elle devait sa survie à un milicien ironique non?

Quel dur retour à la réalité, elle connaît la vérité mais elle ne voulait pas complètement la voir. Il ne fallait plus y penser, il fallait continuer à sourire, à jouer le jeu. Il fallait faire taire la vérité pour continuer à vivre dans ce monde vicié. Mais dans quel monde était-elle tombé après tout? N’y en avait-il pas un meilleur ou elle aurait pu atterrir? Avait-elle fait quelque chose de mal pour devoir tomber ici, maintenant et dans cette enveloppe? Elle avait du être très vilaine…pourtant elle n’en avait aucun souvenir, aucune impression.

Elle déambulait comme une âme en peine, une âme en proie à la tourmente. La main droite pendant dans le vide, ses doigts glissant sur le pelage du presque loup. La main gauche dans une poche quelconque. Aujourd’hui Léna avait revêtit une autre couleur que le blanc. Le blanc, la pureté, la vérité c’était envolée en fracas. Elle soupirait, elle chantonnait tout bas pour elle-même. Rester forte, rester fière elle le devait mais en même temps pourquoi n’avait-elle pas le droit de flancher? Oui elle aurait voulu être faible en ce moment, s’effondrer et pleurer mais à quoi cela aurait-il bien pu servir? À rien, rien du tout à part laisser une fente, une crevasse a vicié.

Fatiguée,elle s’assit à l’entrée de la forêt. Depuis combien de temps marchait-elle? Longtemps une heure ou deux va savoir. La notion du temps lui avait échappé en cette triste nuit. Elle posa doucement sa tête sur le dos du presque loup. Elle portait un pantalon par signe de rébellion? Pas banale pour une femme de ce temps…

Pourquoi avait-elle du apprendre ce qu’on fait des étoiles? Pourquoi est-ce que ce n’était pas elle qui était morte à la place de son amie? Mais la perte de son amie devait sûrement être plus importante que la sienne…sa mort faisait encore plus mal sûrement… Trop d’hypothèse, trop de sûrement, trop de pourquoi…

Nouveau soupir, l’enfant ferme les yeux. Elle aurait aimé être ailleurs, dans un monde plus gai, dans un monde ou elle aurait eu une famille et une vie…

[ Docteur vous me prescrivez quoi? ]

[ Tend la langue, petite Alice... ]

En bordure de la forêt, notre petite étoile se lamente de ne pas avoir suffisament d'ailes pour atteindre son ciel. La nuit surplombe la forêt d'un manteau d'ombres et le ciel est vide et triste. Ses yeux se sont fermés et elle réfléchit à son passé et les lucioles qui y trainent. La lumière ne la réchauffe malheureusement pas. Elle est extirpée de son sommeil par des échos.

Des échos de tasses qui clignent et s'entrechoquent. Cling, clang. Des rires humides, des bruits savoureux. Les bruits viennent de la forêt. Elle se retourne et tente de courber son regard et de pénétrer les arbres et le bois. L'odeur qui en émane n'est ni encourageante, ni rageante, ni vivante, ni effrayante. Attirée, elle approche, animée par toute la curiosité de sa jeunesse. L'animal la suit, animé de ses scrupules et de son instinct protecteur.

Attablés, le docteur et son énorme gorille sont dans une clairière. Au centre de la petite table ronde, une lanterne et une theillière qui bout. Qui se répand en voluptes de fumée. Entre les mains des deux comparses, deux tasses. Le gorille grogne doucement et Chuck avance son pion en B6. En ce moment, une partie d'échecs se dispute. La machoire du docteur craque et son teint semble poussiéreux.

La nature, habituellement vivifiante, est ici teinté d'une multitude de lanternes jaunes et sales qui entourent la circonférence de l'espace ouvert. Hook avance son cavalier en laissant échapper un son étrange de sa gorge de primate, rauque et singulier; un bruit de joie, on devine. La lune semble s'être camouflée. Peut-être par honte, peut-être par lassitude.

La situation semble équivoque, mais Avernteous reste aussi gentilhomme que possible. Éloigné de la table, un sac noir et vide, décore la scène et laisse un sentiment d'inconnu.

- Mes félicitation, Mr.Hook. Une autre tasse pour fêter votre victoire ?

Le gorille replaçe son chapeau et observe son ami verser le thé rouge dans sa tasse. Les deux joueurs replaçent le jeu pour une nouvelle partie. Un os craque, un regard se rive sur une silhouette, dissimulée dans le tapis de l'ombre.

Un pas, deux pas, trois pas et une brindille cassée. Et Chuck murmure.

- Ma foi, mon cher ami, il semble que notre impromptue invitée nous quitte déjà... Allez me la quérir.

Il lui tend une carte sur laquelle, en quelques secondes, il a inscrit quelques mots de politesse. Un pas, deux pas, trois pas, quatre pas et, d'un coup, un énorme gorille s'impose sur le chemin, s'extirpant de la forêt. Un chapeau, un foulard et un air dur et hostile. Pendant un temps, il ne bouge pas et les grognement du loup ne semble pas l'atteindre. Et il tend la carte.

"Ma chère,

Vous êtes cordialement invitée à prendre part à notre petite soirée. Nous observons d'autant plus votre politesse de n'avoir pas suivit votre première impulsion et de vous êtres joint à nous. Mr. Hook, qui est devant vous, va vous y amener. Veuillez le suivre et n'ayez aucune objection, il connaît le chemin. Vous passerez une agréable soirée, je peux vous l'assurer."

Une signature difficile à déchiffrer termine le message. Le gorille a toute l'apparence d'un mur et son regard est noir. Il semble attendre. Bien qu'on ne soupçonne pas la force des crocs de Blue, il ne fait aucun doute que le gorille est un argument poignant lors d'une confrontation du genre.

Toujours installé au centre de l'illuminée clairière, Chuck range les pièces du jeu d'échecs, les deux tasses de thé chaud se refroidissant dans l'air en quelques volutes de fumée. Lorsqu'il la voit, un sourire bien franc se dessine sur son visage et il se lève pour saluer en retirant son chapeau.

- Mademoiselle, laissez-moi le plaisir de me présenter. ... Chuck Avernteous, médecin et docteur en tout genre, pour votre service.

Le gorille marcha lourdement et alla s'immobiliser près du chemin que lui et Héléna venait d'emprunter. Il repose délicatement son chapeau sur son crâne dégarni, étrangement comparable à ces têtes réduites retrouvées dans les régions Shuars.

- Et vous êtes ?

Un sourire parfait et un ton des plus invitants mais, définitivement, tout cela ne colle pas avec ce qu'on voit.

Une moue de croque-mort, à peine théâtrale.

- Voyons ! Partir, déjà ? Juste quand nous venons de nous rencontrer ? Ne soyez pas si timide... Et puis, si vous partez si tôt, Mr.Hook serait si attristé... Lui qui aime tant la compagnie des jeunes femmes telles que vous.

Il s'assoit et indique l'autre place, en face de lui, d'un geste qui est loin de ressembler à un ordre. Son sourire reprend place, sa voix est toute appro

- Nous avons des biscuits et un thé rouge de la plus haute qualité ! Et, même, j'avais prévu un gigot pour mon grand ami, mais je suis certain que cela ne lui dérangera pas de partager avec votre loup.

Il retire son chapeau et le dépose près d'une petite valise qui traîne près de son siège. Ses yeux sont rivés sur la jeune Héléna, semblables à un argument étouffant, un avertissement amical, un coup de rasoir dans le vide, une invitation au jeu, un délai à la douleur ou, plus simplement, quelque chose de contradictoire, mais qui s'accompagne d'un charisme pénétrant.

- Ma chère, si vous saviez à quel point ce qui est planifié peut receler en matière d'ennui et à quel point les surprises du hasard, ou ce que nous nommons comme tel, font, en fait, de la vie tout ce qu'il y a d'intéressant... Et puis, de toute façon, Mr.Hook ne sait pas faire la conversation, abaissant sa voix pour ne pas être entendu dès qu'un sujet ne lui plait pas, il se renfrogne et commence à bouder.

Un sourire moqueur, qui ne semble dirigé ni vers elle et ni vers Mr.Hook, vient effacer tout souvenir de son ton sérieux. Il se verse donc une tasse de thé en ne lachant pas sa jeune invitée du regard et en verse aussi dans la tasse qui est devant celle-ci. Il le repose dans un "Ting" sonore.

- Votre politesse vous perdra, douce Héléna. Et puis, vous n'avez aucune raison de craindre de cetr innocent thé, si vous ne le buvez pas, c'est Mr.Hook qui s'en chargera. ... Donc ? Vous restez toujours sur votre position ?

Affirmation, négation ou confusion ; peu importe. Il insiste, mais pas trop. Il sourit, mais pas trop. Il la dévisage, mais pas trop. Ses épaules menues et son teint de pêche iraient si bien avec les couleurs froides de son laboratoire. Il y pense, mais pas trop. Il reste quelque peu silencieux, mais pas trop, buvant à petite gorgée son le liquide encore bouillant. Tout sourire et étouffant un soupire, il articule sogneusement sa bouche pour que les mots sortent nettement.

- Mais dites-moi, qu'est-ce qu'une jeune fille telle que vous vient faire près de la Prâth ? Fuyez-vous tout comme moi l'agitation perpétuelle de la cité ou bien avez-vous quelques poignants souvenirs reliés à ses alentours ? À moins que ce ne soit autre chose ? Et, concluant .. Dites-moi, je suis curieux.

Ses yeux s'y posent, s'y attachent et s'y insèrent. Ah, la jeune pêche qui n'attend que d'être croquée et sa prudence qui attise le goût de défi du docteur. Comme une maladie qui nargue ou tumeur maligne qui vous titillerait en jouant à cache-cache. Les images rouges et positivement odorante affluent, un peu comme le sang dans ses veines, et il sourit, de plus en plus extastique à l'encontre de la douce.

Il répond d'un sourire brillant, aveuglant et, même, trop naturel pour la conversation. Comme l'épaule dénudée et dévorée de vers qu'on a oublié de recouvrir à l'enterrement d'un prêtre ou l'éléphantesque érection d'un baigneur qui bave en regardant des petites filles jouer à chat.

- Mais je vous l'ai dit, ma chère : Je fuis l'agitation de la ville pour me recueillir auprès des bruits étouffés de la forêt. ... Et puis, s'il la boit devant vous, il ne serait même plus question de vous la passer ensuite; à moins que vous ne vouliez boire une tasse de bave !

Et il rit. Un rire nerveux, mais sombre. Un rire qui s'étire et, finalement, qui ne rit pas du tout pour ce dont il est question. Il réussit à se taire en buvant une nouvelle gorgée de thé et, à chaque instant, il devient de plus en plus exalté.

De plus en plus... Indéfinissable ?

Non... Ce n'est pas ça.

Fou ? Non plus.

Obsédé alors ?

Non, maniaque.

- Mais, ma chère, ne vous inquiétez pas... Ce genre de désagrément que nous vous posons là ne vous arrivera pas plus qu'une fois, prenant soudainement un ton froidement passionné, je vous en fait la promesse.

Il fait craquer sa machoire et rit encore, à peine, discrètement, à la dérobée. Un ton de voix convenable, désormais.. La crise semble s'atténuer ou entrer dans une nouvelle phase tel la syphilis qui, avant d'attaquer le cerveau, semble disparaître complètement pour rassurer l'infecté(e).

- Et sinon, que faites-vous dans la vie jeune fille ? Avez-vous un emploi ou une famille avec laquelle effleurer tendrement les pages de votre vie qui, si je puis me permettre, en est encore à son préambule ?

- Ah et bien, voyez-vous, j'ai un emploi assez fixe et une famille (pour la plupart) décédée, dysfonctionnelle, comme vous l'avez si justement signifié. ... Mr. Hook est le seul qui me reste et, heureuseument, lui et moi nous entendons à merveille. Tournant sa tête vers le gorille, N'est-ce pas mon cher ?

Celui-ci émet un grognement positif en guise de réponse, ne bougeant toujours pas du chemin. Chuck reprend sa tasse, qui est désormais vide, et décide de s'en verser une autre.

- Sinon, vous devriez réellement goûter à ce thé. C'est un thé rouge et le thé rouge a l'habitude de charmer les bouches les plus réfractaires à ce genre de breuvage. ... Et avec cet air frais, un bon liquide chaud ne peut pas faire de mal.

Il boit doucement et le vent se lève, agitant les arbres en un bruissement dès plus agréable.

Le docteur sourit, derrière sa tasse. Pourquoi ? Parce qu'il se sent comme le chasseur qui, durant des heures, attend le moment propice pour dévoiler son jeu et planter son attaque. Parce qu'il est calme, mais si nerveux en même temps. Parce que la peau de cette petite qui, on le note, ne manquerait sans doute à personne semble si lactée.

Il sourit par projection. Il sourit aussi parce qu'elle croit encore être dans une relative sécurité.

Pensivement :

- C'est votre choix. Et reprenant tout son aplomb, Avant que vous nous réjouissiez de votre présence, nous avions une interrogation philosophique à propos d'un adage populaire; peut-être que vous le connaissez ? Il se dit comment suit : "La vraie victore est dans le refus de combattre". ... Mr.Hook avançait qu'il était question de lâcheté ou, du moins, du point de vue de celui qui voulait combattre tandis qu'à mes yeux, c'est plutôt une façon de se préserver d'un échec potentiel.

Ses lèvres heurtent sa tasse et il en savoure lentement le pourtour, avec attention. L'art de prendre le thé, comme on dit. L'art, sous toutes ses formes. L'art de la réthorique, l'art de découper une cage thoraxique, l'art d'insinuer, d'éternuer, de tuer, de rebondir, de sourire, de jouer, de mentir, de ne pas dire ce qu'on pense, de supposer autre chose, etc. Son sourire ne le quitte pas. Et distraitement :

- Et vous ? Vous avez un avis sur la question, tendre amie ?

C'est avec un regard pétillant qu'il écoute cette jeune femme déblatérer sa réponse. Il dépose sa tasse et laisse passer un maigre silence avant de parler, la dévisageant de contentement.

- Quelle délicieuse réponse, mademoiselle Héléna. Vous détruisez d'un coup franc les élucubrations de ce bon vieux Hook. ... Mais une question, sans doute la plus importante, demeure : Parmi les cas que vous avez énuméré, qu'êtes-vous exactement ? ... Lorsque vous combattez, croyez-vous toujours que vous allez vaincre ?

Il reprend sa tasse, de plus en plus attisé par les mots qui s'échappent de cette petite bouche et de ses minces lèvres rosées. Définitivement, son intelligence rajoute à son charme et son excès de prudence la rend encore plus aguichante.

À ce moment précis, son teint semble encore plus blême et, le temps d'un battement de cil, une ombre blanche passe sur son visage.

Et le sourire revient.

Et tout va bien.

Il cligne de l'oeil droit. Un mouvement venant de l'emplacement de Mr.Hook.

Et comme un trait de lumière jaillissant d'une ténèbre qu'on tentait de percer du regard pour y déceler quelques ennemis cachés :

- Et croyez-vous m'avoir sous-estimé, douce Héléna ?

Soudainement sèche, sa voix avait été rapide et, en un instant, il avait posé sa tasse dans sa petite assiette. Un "ting" ponctue la pointe et ses yeux sont rivés tandis que son sourire, bien qu'identique au précédent, adopte désormais un aspect un peu plus porté au sadisme.